2014-01-12
Les Béni Senous perpétuent Ayred
Les festivités célébrant le Nouvel An berbère sont organisées chaque année un peu partout dans le pays. A Tlemcen, la tribu des Béni Senous, occupant une bonne partie du sud-ouest de la wilaya de Tlemcen perpétuent la tradition d'Ayred, ou encore le lion en organisant son habituel carnaval annuel, dédié au courage et à la puissance. Dans ce rituel, sont mêlés des chants que l'on dit sacrés et autres rites. Des jeunes et moins jeunes, déguisés de la tête au pied en peaux de bêtes, sillonnent les artères principales du village de Lakhmis, petit bourg abritant le chef-lieu de la commune de Béni Senous. Ayred, qui est devenu une coutume incontournable de la vie sociale des habitants de la commune de Béni Senous, porte dans ses dimensions la célébration de Yennayer, qui inaugure le calendrier agraire toujours largement consulté et pris en compte dans les pays d'Afrique du Nord. Ainsi, à la tombée de la nuit, des jeunes et moins jeunes, tous masqués, sortent dans les rues étroites de Lakhmis. Ils se mettent à danser à une cadence magique en chantant à haute voix.
La procession prend le départ à partir du sanctuaire du village. Éclairés par des flambeaux en alfa, les acteurs entrent en transe.
Les Ayred, choisis parmi les plus grands et les plus forts du village, prennent les devants de la foule. Parmi eux, la lionne enceinte, une femme au ventre arrondi, fait l'objet d'une attention particulière. Dans cette mise en scène, des symboliques sont à relever, notamment lorsque le lion est attristé. «Les gens implorent la ferttilité de la terre nourricière», explique -t-on. Un vif tumulte s'ensuit lorsque la foule se met à scander «Ayred! Ayred!».
La lionne danse au ralenti, tout en exprimant douloureusement le mal qui la terrasse, l'heure de son accouchement est venue. Autour d'elle, les lions s'évaluent et se bousculent tout en se défiant en exhibant leur puissance et leurs muscles. Le lionceau est né, les lions livrent des combats singuliers qui finissent par l'intronisation du vainqueur qui devient Ayred Amokrane, le grand lion. Celui-ci, qui impose son autorité sur la tribu, prend la tête de la procession qui rend visite à toutes les maisons en scandant: «Ouvrez vos portes, nous sommes arrivés!». Aucune des maîtresses de maisons ne s'oppose à la demande des Ayred.
Tard dans la nuit, la foule se disperse et les masques sont remis dans le sanctuaire avant de passer au «qalmun», la quête. Le sage est le seul à avoir droit de regard sur les offrandes récoltées avant de procéder à leur distribution équitable aux familles nécessiteuses.
A Béni Senous, le rituel qui est très populaire a résisté des siècles durant avant de connaître une petite éclipse aux périodes marquées par la chasse lancée contre les «lumières» dans les années 1990...
Wahib AïT OUAKLI L'expression